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Kant au ministère de l’Education nationale. Ou, conflits dans les facultés ?

Le débat devient intense autour du projet de loi sur l’autonomie des universités.
Les blogs commemcent à alimenter le débat, comme celui de Dimitri Houtcieff , et nul doute que les échanges vont continuer.

En plus de la question sur les enjeux politiques, la réforme de l’Université suscite bien sur des réflexions importantes sur les évolutions nécessaires de ce lieu si particulier de production et de diffusion du savoir qu’est l’Université.
Cette question du lien entre les lieux de la connaissance et la connaissance des lieux est essentielle si l’on veut tenter de s’aventurer sur le terrain d une réflexion simultanée sur le role, la fonction, de ceux qui produisent et diffusent le savoir, la connaissance, et de ceux qui organisent et controlent ces lieux de la production et de diffusion.
On ne produit pas en effet la science de nulle part, sans nulle raison et pour aucun public. Or le cadre dans lequel s’effectue, se construit la science, la recherche, influe beaucoup sur la nature de ce qui y est produit et ce qui est "trouvé" (cf. les travaux de la sociologie des sciences ).
Inutile de dire que les facultés de droit, comme d’autres, sont en prise directe avec cette tension, situées qu’elles sont au coeur de la réflexion sur notamment le conflit entre le pratique et le theorique, l’universitaire et le professionnel.
Pour terminer cette premiere note introductive sur un theme aussi vaste, un texte engagé trouvé sur le site Erudit.org pour inaugurer donc cette reflexion qui ne saurait tarir dans les semaines qui viennent.
Résumé du texte : Universitaire prenant le risque de parler de l’université sans renoncer au « je », l’auteur propose une analyse du champ universitaire aujourd’hui sous l’angle du « conflit des facultés » dont parlait Emmanuel Kant il y a plus de deux cents ans. À l’heure de la globalisation d’un marché mondialisé, il y a risque que les rapports entre société(s) et université(s) conduisent à une nouvelle sujétion, non plus aux pouvoirs religieux ou politique, mais économique. La conclusion prend la forme d’un plaidoyer en faveur du maintien d’une nécessaire et féconde tension entre divers ordres et divers modes de rationalité dans les universités et dans les sociétés.

Commentaire

En effet, je suis d’accord avec vous, la façon dont s’organisent l’Université et les facultés renvoie beaucoup au rapport qui existe,pour revenir aussi sur une problématique kantienne, entre la théorie et la pratique.
Pour citer encore Bourdieu, qui est utilisé dans le texte auquel il est renvoyé dans la note, "la pratique est toujours sous-estimée et sous analysée, alors qu’il faut engager, pour la comprendre, beaucoup de compétence théorique, beaucoup plus, paradoxalement, que pour comprendre une théorie" (Science de la science et réflexivité).
Et la place de l’universitaire, son rôle, la conception qu’il en a, son habitus pour parler toujours comme Bourdieu, sont essentiels à décrypter pour peut être, comme vous le suggérez, arriver à comprendre la tension entre le (la) pratique, le théorique, le domaine de l’universitaire et la mission aujourd’hui largement professionnalisante de l’université, la tension qui en effet se crée entre les exigences de formation des étudiants liées au marché et peut être la formation des enseignants-chercheurs eux-mêmes.
La réaction des universitaires à la réforme qui s’annonce sera d’ailleurs pleine d’enseignements à cet égard.
Mais je ne sais pas si des études existent qui ont abordé le sujet spécifiquement d’ailleurs pour les facultés juridiques.
Pour finir, je m’interroge quand même : pourquoi faut-il toujours aborder ce thème, comme vous y incitez, sous l’angle bourdieusien, qui arrive vite à des considérations qui frôlent la stigmatisation politique.
Même si la maîtrise de la vérité "officielle", celle de l’Université et des Docteurs (de la loi) est bien un enjeu politique, tout ne peut pas être abordé sous cet unique angle là.

Source : theoriedudroit.net